Ils ont fondé des mouvements contre l’occupation et ont lutté tant et plus pour l’âme de la société israélienne mais ont finalement décidé d’émigrer. Les nouveaux exilés expliquent à Haaretz comment ils ont été harcelés et réduits au silence, jusqu’au moment où il ne leur est quasiment resté d’autre choix que de s’en aller.
Fin décembre, quand personne ne savait encore que le coronavirus nous guettait au coin de la rue, Eitan Bronstein Aparicio, 60 ans, et sa compagne, Eléonore Merza, 40 ans, quittaient Israël pour de bon. Tous deux sont bien connus dans les milieux des activistes de gauche. Lui a fondé l’organisation Zochrot il y a une vingtaine d’années, elle est anthropologue politique et tous deux ont co-signé un ouvrage sur la Nakba (mot arabe pour « catastrophe », puisque c’est ainsi que les Palestiniens désignent les événements qui ont entouré la fondation d’Israël). Idéologiquement, politiquement et professionnellement, Eléonore Merza, née en France d’une mère juive et d’un père circassien, ne pouvait tout simplement plus supporter la situation. Bien qu’elle eût été sur le point de se voir accorder le statut de résidente permanente en Israël, elle a trouvé un emploi à Bruxelles et le couple s’y est installé, sans intention de retourner en Israël.
Dans une conversation téléphonique avec Haaretz depuis la Belgique en plein confinement dû au coronavirus, Bronstein Aparicio dit qu’il lui est difficile de croire qu’il est parti. « Je considère la chose comme une sorte d’exil, un départ du centre d’Israël », explique-t-il.
Né en Argentine, Bronstein Aparicio a émigré vers Israël alors qu’il avait cinq ans et il a grandi dans le kibboutz de Bahan, dans le centre d’Israël. « Mon prénom, Claudio, a été changé en Eitan – je porte la révolution sioniste en moi », dit-il en riant. Il se décrit comme un « Israélien ordinaire », qui a fait son service militaire, comme tout un chacun. Un processus personnel qu’il qualifie de « décolonisation de mon identité sioniste » l’a conduit à fonder Zochrot (« se souvenir », en hébreu) en 2001, une ONG qui vise à élever parmi le public juif la conscience de la Nakba et du droit des Palestiniens au retour. Il a cinq enfants : trois d’entre eux vivent en Israël, un au Brésil et, le plus jeune, un garçonnet qui va avoir quatre ans, vit avec le couple à Bruxelles.
« Il y a un point sur lequel je suis en accord complet avec la démarche – à savoir, la nécessité de sauver mon fils du système israélien d’éducation nationaliste et militariste. Je suis heureux de l’avoir sorti de cela »,
dit-il, et d’ajouter :
« Les gens qui ont un profil politique semblable au mien ont le sentiment que nous avons été vaincus et que nous ne sommes plus en mesure d’exercer une influence significative en Israël. Dans le sens profond du terme, nous ne voyons pas de changement pour un mieux à l’horizon, ni de paix véritable ou de vie de qualité. De très nombreuses personnes l’ont compris et ont cherché un autre endroit pour vivre. Il y a quelque chose de complètement vicié, en Israël et, de ce fait, regarder les choses à une certaine distance est du moins un peu plus sain. »
En effet, nombreux sont ceux qui faisaient partie de ce qu’on appelle la gauche radicale en Israël et ont quitté le pays au cours de la dernière décennie. Parmi ces personnes, un grand nombre avaient voué leur existence à l’activisme, fondé des mouvements politiques et dirigé certaines des plus importantes organisations de gauche du pays : non seulement Zochrot, mais aussi B’Tselem, Breaking the Silence (Rompre le silence), Coalition of Women for Peace (coalition des femmes pour la paix), 21st Year (Année 21), Matzpen et bien d’autres.
On y trouve des universitaires de renom – certains ont été forcés de quitter leur emploi en raison de leurs croyances et activités politiques – ainsi que des personnalités culturelles ou des membres des professions libérales, qui ont senti qu’ils ne pouvaient plus exprimer sans crainte leurs points de vue en Israël. Nombreux étaient ceux qui venaient du cœur de la gauche sioniste et qui, ensuite, sont allés plus à gauche ou ont estimé que l’État avait abandonné les principes qui importaient à leurs yeux, à un point où ils ont bien compris qu’ils n’avaient plus aucune place dans le discours public israélien.
Ils sont disséminés dans le monde entier, essayant de se construire une nouvelle existence avec moins de conflits internes et externes, et ce, très souvent, par souci pour l’avenir de leurs enfants. La plupart d’entre eux hésitent à se présenter comme des exilés politiques, mais ils expliquent clairement que c’est leur opposition au gouvernement israélien qui les a poussés à s’en aller ou, du moins, à ne pas retourner en Israël.
Certains ont refusé d’être interviewés, par sentiment de malaise du fait d’être partis et parce qu’ils ne veulent pas que leur acte personnel devienne un modèle pour d’autres. Ceux qui se sont exprimés dans Haaretz seraient les premiers à admettre d’avoir bénéficié de privilèges qui leur ont permis de s’en aller dans un autre pays, puisqu’aucun d’entre eux n’est confronté à un avenir économique incertain ni à la perspective de devoir s’engager dans un travail subalterne ou peu valorisant. N’empêche qu’une certaine touche de tristesse plane au-dessus de toutes ces conversations.
Parmi les noms bien connus qui ne vivent plus en Israël, figurent la conservatrice artistique et théoricienne de l’art Ariella Azoulay et son compagnon, le philosophe Adi Ophir, qui était du nombre des fondateurs de 21st Year, une organisation anti-occupation, et avait refusé de servir dans les territoires ; Anat Biletzki, une ancienne présidente de B’Tselem – le Centre israélien d’information pour les droits de l’homme dans les territoires occupés ; Dana Golan, ancienne directrice exécutive du groupe anti-occupation Breaking the Silence ; le planificateur et architecte Haim Yacobi, qui a fondé Bimkom – Planners for Planning Rights (planificateurs pour les droits au planning) ; le spécialiste de la littérature Hannan Hever, cofondateur de 21st Year et qui a été actif dans Yesh Gvul (« Assez, c’est assez », une association israélienne fondée en 1982 et réunissant des vétérans qui ont refusé de servir au Liban dès le début de la guerre contre ce pays, en 1982, NdT) ; Ilan Pappe, qui fut un jour candidat du parti arabo-juif Hadash et qui fait partie du groupe des « nouveaux historiens ». Il a quitté le pays voici plus de dix ans et vit aujourd’hui à Londres ; et Yonatan Shapira, un ancien pilote des forces aériennes israéliennes qui a lancé en 2003 la lettre des pilotes qui refusaient de participer à des attaques dans les territoires occupés ; il a également pris part aux flottilles de protestation vers la bande de Gaza.
Parmi d’autres encore, le spécialiste en sciences politiques Neve Gordon, qui a été directeur de Physicians for Human Rights (Médecins pour les droits de l’homme) et a été actif au sein du Ta’ayush Arab Jewish Partnership (Partenariat arabo-juif Ta-ayush), un mouvement non violent, anti-occupation et pour l’égalité civile ; Yael Lerer, qui a aidé à la fondation de Balad, le parti politique nationaliste arabe et qui a également fondé la maison d’édition Andalus Publishing (aujourd’hui disparue), laquelle traduisait de la littérature arabe en hébreu ; Gila Svirsky, une fondatrice de la Coalition des femmes pour la paix ; Jonathan Ben-Artzi, neveu de Sara Netanyahou (née Ben-Artzi, NdT), et qui a été condamné à près de deux ans de prison pour avoir refusé de servir dans l’armée israélienne; Haim Bereshit, un activiste BDS, qui a dirigé l’École des médias et du cinéma au Sapir College à Sderot et a fondé la cinémathèque de la ville ; Marcelo Svirsky, l’un des fondateurs du groupe de coexistence arabo-juif Kol Aher BaGalil et co-fondateur également de l’école judéo-arabe de Galilée ; et Ilana Bronstein, Niv Gal, Muhammad Jabali, ou encore Saar Sakali et Rozeen Bisharat, qui ont tenté de créer un lieu de loisirs et de culture mixte, palestino-juif, à l’Anna Loulou Bar de Jaffa (lequel a fermé ses portes en janvier 2019).
Les nouveaux « partants » rejoignent ceux qui s’en sont allés pour des raisons politiques voici de nombreuses années. Parmi ces derniers : Yigal Arens, un activiste de Matzpen, fils de feu Moshe Arens, longtemps ministre de la Défense : les activistes de Matzpen, Moshe Machover, Akiva Orr et Shimon Tzabar, qui s’exilèrent dans les années 1960 ; ainsi que les cinéastes Eyal Sivan, Simone Bitton et Udi Aloni, qui quittèrent Israël dans les années 1980 et 1990.
Le mot qui revient régulièrement quand on parle avec ces personnes est « désespoir ». Un désespoir qui remonte sans cesse à la surface, au fil des années.
« Je me souviens vivement de la période des accords d’Oslo, c’était l’euphorie – que je partageais », déclare Bronstein Aparicio.
« Je me souviens des années où il y avait un sentiment que le conflit pourrait se résoudre et qu’il y aurait peut-être la paix, mais ce sentiment n’a pas existé très longtemps. C’est un sentiment de désespoir permanent qui ne cesse de croître. »
Ainsi donc, après de longues années de militantisme, toutes les personnes interviewées ont témoigné qu’elles avaient perdu l’espoir d’un changement politique en Israël. Nombre d’entre elles sont convaincues que, si un changement doit se produire, il ne viendra pas de l’intérieur même d’Israël.
« Je pense qu’il pourrait venir principalement de l’extérieur », explique Bronstein Aparicio.
« J’ai des espoirs pour BDS, qui est la seule chose significative qui se produit actuellement sur le terrain. De ce point de vue, un exil politique comme celui-ci peut avoir un rôle important. »
Un sentiment d’échec
Neve Gordon, 54 ans, a entamé ses activités politiques quand il avait 15 ans, en assistant à des manifestations organisées par Peace Now. Il a été grièvement blessé au cours de son service militaire effectué comme soldat combattant dans les paras. Au moment de la Première Intifada (qui avait débuté en décembre 1987), il a été le premier directeur exécutif de Physicians for Human Rights Israel. Par la suite, il a été membre actif de l’ONG Ta’ayush, qui organise des rencontres au sein desquelles Juifs et Palestiniens collaborent, et il a été cofondateur de l’école judéo-arabe de Be’er Sheva. Au cours de la Deuxième Intifada, il a fait partie du mouvement des gens qui refusaient de servir dans les Forces de défense israéliennes.
Bien que ses activités politiques aient été très fournies, Gordon est sans doute surtout connu du grand public israélien pour un article d’opinion qu’il a publié dans The Los Angeles Times en 2009, quand il était chef du département »politique et gouvernement » à l’Université Ben-Gourion de Be’er Sheva.
Dans cet article, Gordon affirmait son soutien au mouvement de boycott et qualifiait Israël d’État d’apartheid. La chose avait déclenché la colère au niveau international et la présidente de l’université, Rivka Carmi à l’époque, avait déclaré que « les universitaires qui éprouvent ce genre de sentiment à l’égard de leur pays sont invités à chercher d’autres endroits où travailler et habiter ».
Dans les années qui ont suivi, le département de Gordon à l’Université Ben-Gourion devint la cible de campagnes systématiques menées par des organisations de droite et d’extrême droite, dont Im Tirtzu, qui réclamaient sa fermeture en raison des opinions politiques de bon nombre de ses membres. En 2012, le ministre de l’Éducation, Gideon Sa’ar (Likoud), demanda la révocation de Gordon. À la fin de la même année, le Conseil de l’Enseignement supérieur recommanda que l’université envisage la fermeture du département de Gordon si certaines réformes n’étaient pas entreprises, mais sa décision fut finalement annulée quelques mois plus tard, après l’introduction de quelques changements.
Durant ces années mouvementées, explique le professeur, il a reçu nombre de menaces de mort. Il y a trois ans et demi, lui et sa compagne, Catherine Rottenberg – qui était responsable du programme d’étude des genres à l’université –, sont partis s’installer à Londres en y emmenant leurs deux fils, après avoir reçu tous deux des postes d’enseignants-chercheurs de l’Union européenne. Gordon est désormais professeur de droit international et des droits humains à la Queen Mary University de Londres.
Ce ne sont pas les menaces de mort qui l’ont poussé à s’en aller, explique Gordon, ni non plus la lutte contre l’establishment de l’enseignement supérieur. En fin de compte, ce qui a fait pencher la balance, ç’a été l’inquiétude à propos de l’avenir de leurs enfants. « Je ne vois pas d’horizon politique et j’ai deux fils, avec tout ce qui peut s’ensuivre si on élève ses fils en Israël. »
Et vous avez également décroché un excellent emploi, à Londres…
« C’est vrai, mais mon travail en Israël était meilleur, à longue échéance. J’aimais vraiment le département, à Ben-Gourion, j’aimais les étudiants et aussi la faculté. J’avais l’impression d’avoir une commaunuté et cela a été très pénible de devoir y renoncer. Même quand nous sommes arrivés à Londres, nous n’avions pas l’intention d’y rester. Si nous avions été un jeune couple sans enfants, je ne suis pas certain que nous serions restés »,
ajoute Gordon.
« Ce n’est pas la chose la plus facile, de se lever et de s’en aller à l’âge de 50 ans et quelques. Il y a un sentiment d’échec personnel ainsi que d’échec de son camp [politique]. »
Y a-t-il eu un moment particulier où l’impossibilité de rester en Israël est apparue de façon évidente ?
« Il n’y a pas eu ce genre de moment. Au fil des années, nous avons assisté à un extrémisme croissant. C’en est arrivé au point où nous nous nous sommes sentis mal à l’aise d’emmener nos enfants aux manifestations, en raison de la violence. Le racisme au quotidien crée un lieu où je me sens étranger. »
Le coup final, dit Gordon, est venu quand il a commencé à se rendre compte qu’il n’était plus possible de s’exprimer librement contre la situation raciste dont il était témoin.
« Le dialogue au sein d’Israël, qui était ouvert et dont j’étais fier, a changé. Les choses que des gens comme moi rallient – le soutien au mouvement de boycott et le fait de qualifier Israël d’État d’apartheid – deviennent illégitimes »,
dit-il.
« Et, dans ce cas, vous êtes déjà non seulement hors du consensus mais en dehors de la véritable discussion publique. Vous devenez une curiosité. Puis vous vous dites : »En quoi ai-je besoin de cela ? » »
Le pays a-t-il changé ou est-ce vous qui avez changé ?
« Pour être honnête, le changement s’est sans aucun doute produit en même temps en moi et dans le pays. J’ai également subi un certain processus. Ce que j’ai compris, c’est que la solution ne pouvait être contenue dans le sionisme. »
Haim Yacobi, le collègue de Gordon à l’Université Ben-Gourion et, par conséquent, chef de son département »politique et gouvernement’‘, a également quitté Israël. Cofondateur du Bimkom, qui traite des problèmes de la qualité dans l’aménagement du territoire et le logement en Israël, Yacobi, un architecte de formation âgé actuellement de 55 ans, s’est installé en Angleterre il y a trois ans, avec sa compagne et leurs trois enfants, au moment où on lui a proposé un emploi de professeur à l’University College de Londres. À l’instar de Gordon, il déclare qu’il n’est pas parti pour des raisons de harcèlement politique :
« Si vous considérez carrément la situation politique en Israël, en sus du projet colonial en Cisjordanie et du fait qu’Israël est en train de devenir un État d’apartheid, la question qui se pose alors est de savoir ce que vous voulez pour vous-même et vos enfants. »
Et d’ajouter :
« Pour des gens comme moi – dont le travail est critique et politique et qui ont également été impliqués en tant qu’activistes – la politique de l’espoir ou du désespoir est d’une signification très lourde »,
dit-il.
« Émigrer à mon âge et avec mon statut, c’est dire : Je suis désespéré, je ne vois pas d’espoir. Cela découle de mon analyse politique, qui s’appuie sur la façon dont je perçois ce qu’est un État et une société justes. Ce n’est pas une décision prise du jour au lendemain. Nous n’avons pas quitté Israël en raison du prix du fromage blanc. Nous étions exactement au point où de braves bourgeois commencent à voir les fruits de leur travail et j’ai l’impression que j’avais très bien mené ma barque dans ce que j’avais réalisé en Israël. Il est très effrayant d’émigrer à un âge tardif et de se réinventer. »
Yacobi fait remarquer qu’un grand nombre de ses collègues en Israël, même parmi la gauche radicale, ont considéré son départ comme une trahison. Cette réaction est venue comme une surprise, mais ne l’a pas amené à changer sa façon de voir.
« La motivation au moment de créer Bimkom était ma foi en ce qu’un changement était possible. Je suis moins naïf, aujourd’hui »,
dit-il, ajoutant que la violence politique en Israël l’avait amené à comprendre que s’en aller était la meilleure option, pour lui.
Bien que Jakobi dise qu’il se sentait apprécié dans les universités israéliennes, il est d’accord pour dire également que la liberté académique dans le pays s’est dégradée. « Je pense que des forces politiquement très problématiques ont fait leur entrée et qu’elles sont effectivement devenues la police du monde académique », dit-il.
De Bar-Ilan à Brown University
En effet, l’une des choses dérangeantes qui sont ressorties des entretiens avec les universitaires vivant et travaillant désormais à l’étranger consiste en la contribution décisive des institutions israéliennes de l’enseignement supérieur dans l’éviction d’intellectuels qui présentent un profil politique radical de gauche. Le processus n’a pas toujours été flagrant et, même quand il l’est devenu, certaines des personnes interviewées ont carrément refusé de parler de ce qu’elles avaient subi, par crainte que leurs anciennes universités ne réagissent en tentant de ternir leur réputation professionnelle.
Un cas sans équivoque, abondamment commenté, a été le refus de l’Université Bar-Ilan, au début 2011, d’accorder sa promotion et sa titularisation à Ariella Azoulay, qui enseignait au sein de l’institution depuis 11 ans.
La docteure Azoulay, 58 ans, spécialiste de la culture visuelle, conservatrice artistique et cinéaste documentariste, est l’une des penseuses multidisciplinaires israéliennes les plus influentes et elle avait été embauchée par Bar-Ilan cinq ans après l’assassinat de Yitzhak Rabin, au moment où l’université avait un problème d’image de marque. C’était un acte teinté de pluralisme : employer une professeure aux idées de gauche bien connues dans une université à orientation religieuse et de droite et au sein de laquelle l’assassin du Premier ministre avait été lui-même étudiant. Toutefois, une décennie plus tard, en pleine ère Netanyahou, au moment où des organisations de droite et d’extrême droite constituaient des listes noires d’intellectuels qui critiquaient Israël, l’approche radicale d’Azoulay, apparemment, plaisait nettement moins aux directeurs de l’université.
Au large éventail de protestations en provenance d’éminents universitaires qui exprimaient leur inquiétude de ce qu’Azoulay ait pu être victime d’une persécution politique, l’Université Bar-Ilan répondit que ses considérations avaient été d’ordre strictement professionnel. N’empêche que les réalisations d’Azoulay furent suffisantes pour qu’elle se voie proposer un emploi par l’Université Brown à Providence, dans le Rhode-Island – une université de l’Ivy League ayant la réputation d’être l’une des meilleures institutions d’enseignement supérieur de la planète.
Un an et demi après s’être vu refuser sa titularisation, Azoulay quittait le pays en même temps que son compagnon, Adi Ophir, un spécialiste de la philosophie, professeur à l’Université de Tel-Aviv et figure éminente de la gauche israélienne. Le professeur Ophir avait 61 ans, à l’époque ; Azoulay en avait 51. L’offre qu’elle avait reçue de Brown comprenait un poste d’enseignant pour Ophir aussi. Ces sept dernières années, tous deux ont vécu à Providence, tout en enseignant, en dirigeant des recherches et en rédigeant des ouvrages bénéficiant d’un impressionnant succès international.
Ophir est très méfiant à l’égard de l’expression « exilés politiques ». « Les décisions de ce genre sont une combinaison de nombreuses choses », dit-il lors d’une conversation par Zoom à partir du Rhode Island.
« Le traumatisme de l’éjection [d’Azoulay] de Bar-Ilan en a constitué une bonne partie. Avant cela, nous n’avions jamais cherché d’opportunités d’emploi à l’étranger. Ce ne fut le cas que lorsqu’il apparut clairement qu’ils allaient la mettre dehors pour des raisons politiques. Et aussi la façon dont sa révocation fut reçue par ses collègues de l’université – il y eut une respectable lettre de soutien, mais ce fut tout. Les autres universités ne se proposèrent pas afin de l’embaucher. »« Mais, quand même, si elle n’avait pas reçu cette incroyable offre d’emploi [de l’Université Brown], il est possible que nous n’aurions eu ni la détermination ni la force d’entreprendre une démarche aussi considérable. Le fait politique le plus important est que, depuis que nous sommes ici, nous n’avons pas envisagé de retourner en Israël. Cette période d’existence bien remplie est devenue possible dans un endroit différent ; les compromis politiques et moraux qu’entraîne le fait de vivre en Israël étaient devenus intolérables. »
Ce qui est arrivé à Azoulay est-il typique de ce qui se passe dans les universités et écoles supérieures israéliennes aujourd’hui ?
Ophir :
« Une faille s’est opérée au début de la Deuxième Intifada [en 2000]. Nous nous sommes vus de plus en plus anathémisés. Je n’ai jamais été persécuté à l’Université de Tel-Aviv, mais il y a ce sentiment constant de quelque chose qui s’amplifie tout autour de vous, un genre d’incrustation, et cela signifie : Voici les limites, vous ne pouvez pas les franchir, ces idées ne peuvent être exprimées actuellement, vous ne pouvez pas traiter de ces choses. Parce que pour tous ceux qui les traitent, il n’est pas certain que leur doctorat sera approuvé ou que leur article sera accepté ou que leurs étudiants recevront des bourses. Dans mon cas, du moins, tout a été sur un mode très mineur, mais il y avait un sentiment croissant que notre présente n’était tout simplement plus souhaitée en cet endroit. »
De l’endroit lointain où il se trouve, il poursuit :
« J’ai commencé à percevoir des choses que je ne voyais pas, quand j’étais là-bas. En Israël, j’avais maintes réserves, au sujet de BDS. J’y pensais du point de vue de mes activités universitaires et je ne cessais de tenter de passer entre les gouttes, en fait : reconnaître la légitimité du mouvement de boycott sans accepter sa formulation radicale. Mais j’ai fini par comprendre que ce que j’essayais de faire, c’était de me protéger et de protéger en même temps mon espace au sein du monde académique. »
Ophir n’a pas toujours été dans cette zone de conscience. Il a grandi dans un foyer révisionniste de droite avant de devenir un membre dévoué du mouvement de jeunesse sioniste socialiste Hamahanot Ha’olim. En 1987, il cofondait 21st Year en compagnie de Hannan Hever, qui allait devenir professeur de littérature hébraïque à l’Université hébraïque de Jérusalem et qui, actuellement, vit lui aussi aux États-Unis. Leur mouvement était un mouvement de protestation qui appelait à refuser de servir dans les territoires et à boycotter les produits en provenance des colonies.
« À l’époque, Hannan et moi parlions du refus de servir dans l’armée en termes d’auto-accomplissement », raconte Ophir.
« Nous pensions que l’engagement personnel dans l’État d’Israël devait s’exprimer par un refus de servir dans les territoires. J’étais totalement sioniste. Il m’a fallu plus de temps pour comprendre ce que cela signifiait d’être sioniste. »
Ophir ne nie pas que le pays dans lequel il vit, les États-Unis, soit responsable de maux horribles.
« En ce sens, les États-Unis sont un endroit effrayant et, depuis l’élection de Trump, ils sont devenus plus effrayants encore »,
dit-il.
« Mais quand vous vous opposez au régime des États-Unis, vous n’êtes pas seul. Vous faites partie d’une masse importante, active et créative. Je puis en parler avec les étudiants en toute liberté. Dans mes dernières années en Israël, je sentais que lorsque je parlais de politique à l’université, on me regardait comme si j’avais été un OVNI. »
Vous sentez-vous également moins seul à propos de vos opinions sur Israël ?
« Pour la majorité de mes collègues, Israël est une cause perdue. Et, la plupart de temps, je suis d’accord avec eux. Un exilé politique est quelqu’un dont la vie est restée dans l’endroit qu’il a quitté, et dont la vie dans son nouvel endroit est en quelque sorte estampillée, dans ce contexte. Je ne ressens pas les choses de cette façon. Je ressens une grande part de douleur en même temps qu’un profond sentiment d’inutilité. Occasionnellement, je fais encore des choses sur le campus, de petites choses. C’est mon « devoir de réserve ». Mais le centre de mon attention et mon intérêt ne sont plus là. Le monde entier va de mal en pis, et peut-être même va-t-il vers sa fin. Le projet colonial sioniste est quantité négligeable, dans tout cela. »
Il poursuit :
« Ce fut un long processus de séparation. Ma mère est morte après de longues années de sénilité. La séparation avec elle a duré quinze ans. La séparation avec Israël y ressemble, en quelque sorte. Israël est quelque chose qui devient étranger, éloigné. Dans une large mesure, j’ai remplacé mon intérêt pour l’Israël politique par un intérêt croissant pour la pensée et l’histoire juives. Je me suis retrouvé un petit endroit qui remplace la maison de Tel-Aviv. Je me sens bien d’être un juif de la diaspora. »
Y a-t-il des gens qui ont eu l’impression que vous abandonniez le navire ?
« Oui – pas mal, je pense. Certains l’ont dit ouvertement. J’ai pensé qu’ils devraient s’en aller, eux aussi. Mais c’est facile à dire : Tout le monde n’a pas un parachute doré pour se recaser. Manifestement, il y a un élément égoïste, dans ce que nous avons fait. »
Y a-t-il des choses qui vous manquent, à propos d’Israël ?
« Le houmous ? » Ophir rit.
« Je plaisante. Mes enfants me manquent, ainsi que mes petits-enfants. Beaucoup, même. Parfois, Tel-Aviv me manque. Parfois, voyager dans le pays me manque – aller dans le désert en hiver. Mais il y a vraiment peu d’endroits où j’irais aujourd’hui sans avoir l’impression que je marche sur les terres de quelqu’un d’autre. »
Ariella Azoulay a refusé d’être interviewée, mais a envoyé une déclaration écrite :
« Je n’ai pas confiance dans la presse et je ne tiens pas à être représentée par elle. Je soutiens le boycott et je ne vois aucun intérêt à me faire interviewer au profit d’un journal sioniste. Ce que j’ai à dire du fait que je suis née »israélienne » en tant que forme de contrôle par l’État sur le corps et l’esprit de ses sujets et citoyens et sur mon refus de m’identifier dans la catégorie »israélienne », je l’ai écrit dans l’introduction de mon nouvau livre et je n’ai rien à y ajouter. »« Et, en outre, l’émigration suite au sentiment de l’impossibilité de vivre dans l’endroit où vous êtes née, parce que vous servez à garder à l’extérieur ceux qui en ont été chassés, est douloureuse, et je n’ai aucun intérêt à partager cette douleur avec un public sioniste qui nie la douleur et la perte que l’État d’Israël a infligées et continue à infliger, avant tout à ses habitants palestiniens et, d’une façon différente, à ses citoyens juifs. » (Le tout dernier livre d’Azoulay est intitulé Potential History: Unlearning Imperialism – L’histoire potentielle : désapprendre l’impérialisme – et a été publié l’an dernier chez Verso Books.)
Une fois suffit
Hagar Kotef, 43 ans, s’est retrouvée dans une situation plus dérangeante encore vis-à-vis d’une université israélienne. La Dr Kotef, qui était active au sein de Machsom Watch et d’autres mouvements de gauche, a terminé son doctorat en philosophie à l’Université de Tel-Aviv et à l’Université de Californie, à Berkeley. En 2012, elle a eu l’occasion de retourner en Israël dans le cadre d’un plan d’intégration d’universitaires rentrant au pays. On lui proposait un poste d’enseignante dans un programme prestigieux de l’une des universités du pays.
Le soir précédant l’approbation de son contrat, une ONG d’extrême droite lançait une campagne contre son engagement par l’université. Il en résultait que le recteur refusait de signer le contrat et que l’université faisait état de nouvelles conditions de nomination, à savoir la signature d’un engagement concernant ses activités politiques. On exigeait de Kotef qu’elle s’engage à ne pas assister à des manifestations, qu’elle ne signe aucune pétition et qu’elle ne prenne pas la parole en public – ni en classe – sur le moindre sujet sans rapport avec ses recherches universitaires.
C’était en été 2014. Quand l’opération « Bordure protectrice » fut déclenchée dans la bande de Gaza, Kotef signa une pétition sur Internet demandant à Israël de négocier avec le Hamas. Quelques minutes plus tard, elle recevait un coup de fil de l’université l’informant que cette dernière mettait un terme à son contrat. Kotef porta l’affaire devant le tribunal du travail et fut réengagée. « Je repris mon travail mais jamais je ne reçus mon contrat. »
Kotef et son conjoint, un physicien et spécialiste du cerveau, se mirent à chercher des emplois en Angleterre.
« Il était clair que rester là [à l’université] n’était pas une option et il était tout aussi clair que je ne trouverais un emploi nulle part ailleurs en Israël »,
dit-elle.
Plus tard, Kotef décrocha un poste de professeure en politique et théorie politique à l’École des études orientales et africaines de l’Université de Londres. Après y avoir enseigné pendant un semestre, elle et sa famille quittèrent Israël pour de bon :
« La combinaison de ce qui se passait à l’université, la guerre, la violence dans les rues, la crainte de s’exprimer, le racisme et la haine m’avaient simplement brisée. »
Même aujourd’hui, six ans plus tard, Kotef est toujours manifestement ébranlée par les souvenirs de cette période :
« L’exil est un concept trop fortement chargé : je ne me catégorise pas comme une exilée politique parce que, l’un dans l’autre, nous sommes partis pour un bon emploi et un bon endroit. Mais, en même temps, nous ne sommes pas partis suite à un choix et ce n’a pas été une réinstallation. »
Kotef admet franchement qu’elle n’a pas trouvé le moyen de poursuivre ses activités politiques à Londres.
« Je ne suis pas capable d’être une activiste [concernant Israël ou d’autres questions] ici », ajoute-t-elle.
« Il y a quelques années, mon conjoint m’a réprimandée parce que j’avais été à une manifestation : »Nous avons déjà été chassés d’un pays de ta faute, nous ne voulons pas être expulsés d’un autre pays ! » »
Vous sentez-vous coupable d’être partie ?
Kotef :
« Non. J’ai perdu l’espoir qu’il soit possible de changer les choses de l’intérieur, de sorte que je n’ai pas le sentiment de pouvoir encore faire quelque chose si j’y étais [en Israël]. Mais, quand même, je me sens coupable envers ma famille, envers mes parents, qui ont été séparés de leurs petites-filles, et envers mes filles, que j’ai emmenées en cet endroit. Parfois, je regarde et je me dis qu’il est heureux que nous ne soyons pas en Israël ; et parfois il y a un sentiment de perte. Londres est une ville cosmopolite, mais il y a toujours une haine des minorités, ici, et le Brexit l’a révélée avec intensité, et nous serons toujours des étrangers, ici.« Mais je préfère vivre et élever des enfants dans un endroit où mon appartenance étrangère engendrera parfois des antagonismes, plutôt que dans un endroit où je fais partie du camp qui est raciste à l’égard de l’autre. Il y a des moments où je me demande ce que nous avons fait, mais je n’ai pas l’impression que ç’ait été réellement notre choix. »
Un endroit dangereux
« Je n’ai pas eu de parachute doré sous forme d’un emploi dans une université, comme certains », déclare Yael Lerer, 53 ans, traductrice et éditrice qui a mené des tentatives de rapprocher Israéliens et Palestiniens selon un point de vue civique et culturel.
Lerer, qui s’est installée à Paris en 2008, était une importante activiste au sein de l’Equality Alliance (Alliance pour l’égalité), un mouvement politique arabo-juif d’où est sorti le Balad (acronyme pour Brit Le’umit Demokratit – Alliance nationale démocratique, NdT) et, plus tard, elle a été la porte-parole du parti et l’assistante parlementaire du député arabe israélien à la Knesset, Azmi Bishara. Elle avait également été la directrice de campagne du Balad pour les premières élections auxquelles le parti avait participé. En 2001, elle avait en outre fondé la maison d’édition Andalus Publishing.
Bien que Lerer vive à Paris depuis plus d’une décennie, elle dit qu’elle a l’impression de ne jamais avoir quitté Israël.
« Je vais et je viens. Je ne me suis pas complètement coupée d’Israël. Il se fait simplement que ma vie de tous les jours est devenue plus plaisante. Mes amis français se plaignent du racisme dans ce pays, mais nous parlons d’une échelle tout à fait différente par rapport à Israël. »
Les persécutions politiques dont elle a fait l’objet en Israël font qu’il lui est parfois difficile aussi de trouver du travail en France ; pour joindre les deux bouts en fin de mois, elle doit compléter ses gains dans la traduction et l’édition en travaillant dans l’immobilier (« ce que je déteste réellement »).
« Il y a des projets qui m’intéressent mais, là, ils ne me laissent pas faire, parce que, lorsqu’on me cherche sur Google, en France, la première chose qui apparaît, c’est que je suis l’une de ces Israéliennes qui ont scellé une alliance avec les terroristes »,
dit-elle.
« Il y a eu des incitations au meurtre contre ma personne et j’ai fait l’objet de diffamations. On m’avait proposé un boulot à la télévision, mais quelqu’un s’y était opposé, parce qu’ils ne voulaient pas avoir d’ennuis avec la communauté juive. Les instituts de recherche qui m’ont approchée se sont également ravisés à la dernière minute, et pour la même raison. Par conséquent, je ne puis surtout travailler que dans des domaines où je ne passe pas à l’avant-plan [à propos de qui je suis]. »
En 2013, Lerer est retournée en Israël pendant quelque temps et elle a été candidate à la Knesset pour le compte du Balad, occupant la 12e place (de façon irréaliste) sur la liste. Alors qu’elle participait à un débat au Collège académique de Netanya, juste avant les élections, elle a fait l’objet d’une ataque violente par des gens de l’extrême droite. Les autres participants au débat n’avaient même pas pris sa défense, explique-t-elle.
« Ce fut presque un lynchage », rappelle-t-elle.
« Encore heureux qu’il y ait eu les gardes de la sécurité. J’avais toujours pensé que, même si je recevais des messages de haine et des menaces de mort, ce ne serait que sur Internet, mais que, dans la vie réelle, personne ne me ferait réellement du mal. Et, brusquement, j’ai compris que je ne pouvais plus compter là-dessus. J’ai compris qu’Israël était devenu en endroit dangereux pour moi. »
Le meilleur moment pour émigrer
Rozeen Bisharat et Saar Sakali, qui forment un couple dans la vie, ont désespéré au sujet d’Israël alors qu’ils étaient nettement plus jeunes que les autres personnes interviewées mais, même dans ce cas, ils ont senti qu’ils devaient s’en aller sans trop tarder. « Le meilleur moment pour émigrer, c’est quand vous avez une vingtaine d’années », explique Sakali. « Mais j’avais déjà 33 ans et Rozeen en avait 32 et nous avons eu l’impression que, si nous attendions une minute de plus, il serait trop tard. »
Sakali, qui est juif, et Bisharat, qui est palestinienne, faisaient partie des propriétaires de l’Anna Loulou Bar à Jaffa, et ils étaient activistes politiques, mais de façons différentes. Bisharat était impliquée dans l’organisation estudiantine du parti Hadash et, lors des protestations en faveur de la justice sociale, durant l’été 2011, elle avait dressé la « Tente 1948 » sur le boulevard Rothschild à Tel-Aviv, dans un effort en même temps d’accroître la conscience de la Nakba. Sakali était un activiste dans le domaine de l’art performance politique. Ils ont quitté Israël voici deux ans et demi.
Ce qui a provoqué leur départ, disent-ils, résidait dans la question de savoir s’il était possible de susciter un changement.
« Quand vous essayez d’exercer une influence ou de changer l’opinion publique, la chose dépend de ce que vous croyez ou pas qu’il est toujours possible de changer les choses »,
explique Sakali.
« C’est une question d’optimisme – et c’est précisément ce qui nous a manqué, dans la période qui a précédé celle-ci. »
L’espoir s’est évanoui pour Bisharat après que le mouvement de protestation s’est terminé et a été sévèrement battu au moment de la guerre à Gaza, en 2014.
« Depuis des années, je pensais qu’il était possible de générer un changement dans la société israélienne, d’amener aux gens un contenu auquel ils n’avaient pas été confrontés »,
dit-elle.
« Mais avoir des opinions différentes fut bientôt considéré comme une trahison. Automatiquement, si vous n’êtes pas d’accord avec le discours de l’État, vous devenez un traître. Et à moi, en tant que Palestinienne, on a dit : « Ça ne te plaît pas ? Va à Gaza. »
Il n’y a personne avec qui pouvoir discuter. Pas même à Tel-Aviv.
« À Berlin, je suis du Moyen-Orient, ou je fais partie du monde arabe. Je ne suis pas un gadget, un objet de curiosité comme je l’étais à Tel-Aviv, mais l’une parmi des centaines de milliers d’autres personnes étrangères. »
Article de Shany Littman, publié le 22 mai 2020 sur Haaretz sous le titre : After Losing Hope for Change, Top Left-wing Activists and Scholars Leave Israel Behind
Traduction : Jean-Marie Flémal pour Charleroi-Palestine