Par Laurent Vogel
Depuis Maïdan (2014), le cinéma ukrainien a pris un essor remarquable. Sa diversité reflète les multiples facettes de la société ukrainienne. Dans une production très diversifiée, les cinéastes d’Ukraine ont construit une visionkaléidoscopique de leur société. Le tournant pris par le cinéma ukrainien après Maïdan reflète à la fois le mouvement d’une société qui s’interroge sur ce qu’elle est et l’enthousiasme de générations nouvelles engagées dans une rupture avec le passé. Dans cette nouvelle vague, les femmes jouent un rôle important et cela se reflète dans les thématiques abordées.
Pour Babylon’13, tout a commencé sur la place Saint Michel à Kyïv le matin après le massacre des étudiants. Un groupe d’amis et de connaissances a décidé qu’il voulait prendre une partie active dans les événements de leur pays. Ils n’avaient rien d’autre à proposer que leurs aptitudes professionnelles et ils ont donc commencé de faire des films assez courts pour influencer la société, changer la vision des choses. Le nom de BABYLON’13 vient de nombreuses associations : le film « Babylon XX » d’Ivan Mykolaytchouk, des personnes qui parlent de différentes langues et du fameux sapin sur la place de l’Indépendance (Yolka, dit par le peuple) qui ressemble à la tour Babel.
Leur but est d’encourager, faire rire, faire penser, proposer des idées… Babylon’13 montre la naissance et les premiers pas décisifs d’une société civile, car les derniers événements en Ukraine prouvent la formation d’une nouvelle conscience chez ses citoyens avec une forte organisation propre, une solidarité et un combat pour les droits et les libertés tant collectives qu’individuelles. La force de la nouvelle société est sa génération formée pendant les années de l’Indépendance..
Les films de Babylon’13 témoignent, au jour le jour, de la résistance sous toutes ses formes dans un pays en guerre. Plutôt que des images de combat, ils montrent la vie quotidienne dans toute sa complexité. Filmés généralement avec des smart phones, ils arrivent à capter des images là où les journalistes professionnels ont plus difficilement accès : dans les territoires occupés, dans les tranchées, dans l’intimité des maisons ou dans les activités de groupes de culture underground. En un sens, ils reflètent le fait que la résistance ukrainienne contre l’invasion russe repose sur des mobilisations multiples de la société et pas uniquement sur le front.
Babylon’13 regroupe actuellement une centaine de militant·es : réalisateurs, opérateurs, ingénieur.e.s du son, producteurs, directeurs de montage, traducteurs, etc. Chacun·e un âge, une expérience, un style de travail et une vision différents. Mais le collectif est soudé par des valeurs communes et la volonté de changer la société par le cinéma.
Anastasiia Perun a travaillé pour plusieurs festivals de cinéma en Ukraine. Réfugiée en Belgique depuis presqu’un an, elle fait partie du collectif cinéma au sein du Comité belge du Réseau européen de solidarité avec l’Ukraine (RESU)
Plus d’informations
° site web du collectif « Babylone 13 » (en ukrainien et en anglais) : https://babylon13.org.ua
° chaîne YouTube du collectif cinéma du RESU : https://www.youtube.com/@solidarukraine8297/videos