[Points Critiques n°382] Israël en campagne électorale… On efface tout et on recommence !

En avril dernier (voir Points Critiques n° 381 de mai-juin), le Likoud de Binyamin Netanyahou avait remporté les élections législatives avec 36 sièges, malgré les casseroles que celui-ci traîne.Ceci qui laissait présager une majorité gouvernementale de droite (et même de droite extrême, voire d’extrême droite) de 65 sièges sur 120. Aujourd’hui on efface tout et on recommence… en septembre ! Pourquoi ? Parce que cette majorité, Netanyahou ne l’a finalement pas obtenue, le parti Ysrael Beytenou (Israël notre maison) d’Avigdor Liberman (5 sièges) lui ayant finalement fait défaut en raison d’un litige sur la question de la conscription des ultra orthodoxes.

Dans tout pays démocratique, le formateur désigné par le président de l’État vient faire part de son échec et celui-ci laisse à un autre formateur le soin de tenter sa chance. Ce n’est qu’en cas de blocage complet que les électeurs sont appelés une nouvelle fois aux urnes. Mais ça ne marche pas comme ça avec Netanyahou… Ne pouvant pas imaginer ne plus être Premier ministre et ne pouvant surtout pas supporter l’idée de devoir répondre d’accusations de fraude et de corruption devant les tribunaux, celui-ci a obtenu d’une majorité à la Knesset de s’auto-dissoudre. Et voilà pourquoi les Israéliens sont appelés à voter à nouveau le 17 septembre.

Un fameux sac d’embrouilles

Mais en attendant, cette campagne électorale est un véritable sac d’embrouilles dans lequel des alliances et des ruptures n’en finissent pas d’agiter le landernau politique. Le premier objectif de Netanyahou est de se débarrasser de candidats qu’il juge dangereux. C’est ainsi qu’il a commencé par offrir à l’ancien ministre de l’éducation, Naftali Bennett, non réélu le 9 avril mais qui est bien décidé à profiter de l’aubaine de la dissolution de la Knesset, le poste d’ambassadeur israélien aux Nations Unies s’il acceptait de renoncer à se présenter aux élections en tant que co-leader de la formation HaYamin HaHadash (la nouvelle droite).
Celui-ci a poliment décliné.

N’étant pas à cours d’idées, Netanyahou a décidé d’appeler des alliés de marque à la rescousse… Ayant déjà utilisé son « ami indéfectible » Trump pour les élections d’avril,
il vient aussi d’enrôler son autre « ami » Poutine, deux démocrates certifiés (!), sous le slogan, je joue dans une « autre ligue », entendez « que mes adversaires ». Ça pourrait cependant ne pas être suffisant pour lui assurer une reconduction à la tête du prochain gouvernement.

Tentative ratée à l’extrême droite

C’est la raison pour laquelle il s’est efforcé de convaincre l’alliance de l’Union des partis de droite – qui comprend les formations HaBayit HaYehudi, l’Union nationale et la faction d’extrême droite Otzma Yehudit — d’évincer HaYamin HaHadash, parti dirigé par Ayelet Shaked, l’ancienne ministre de la Justice et Naftali Bennett, l’ancien ministre de l’Éducation. Tentative ratée. L’Union des partis de droite a au contraire donné à Ayelet Shaked la première place sur la liste électorale conjointe.

La « gauche », un cas désespéré

Après les élections du 9 avril, Avi Gabbay, chef du parti travailliste jugé responsable de sa débâcle, a été remplacé par Amir Peretz qui avait déjà dirigé le parti de 2005 à 2007. Désillusion ! Aussitôt élu, il a refusé une alliance avec le Meretz, seul véritable parti de centre gauche, et annoncé une fusion avec le parti Gesher (Pont) d’Orly Levy-Bekasis, catalogué à droite.

On a aussi assisté au retour de l’ancien Premier ministre Ehud Barak, fossoyeur du sommet de Camp David en juillet 2000, qui a créé un nouveau parti, le Parti démocrate israélien, parti qui a aussitôt été rejoint par Peretz Deri, une activiste venant de HaBayit HaYehudi, le parti d’Avigdor Liberman. Deuxième grande désillusion, le Meretz a décidé de faire liste commune avec ce nouveau parti de Barak !

À nouveau une liste arabe unie

La seule bonne nouvelle est que les quatre partis arabes, Hadash, Taal, Raam et Balad, ont à nouveau décidé de faire liste commune comme aux élections de 2015 où elle avait recueilli 13 sièges. Aux élections d’avril dernier, les quatre partis s’étaient présentés sur deux listes séparées et n’avaient plus recueilli que 10 sièges.

Leur tâche ne sera cependant pas facile… Le Likoud, parti de Netanyahou a en effet multiplié par deux son budget destiné à une opération de surveillance des bureaux de vote dans les villes arabes. La raison officielle est d’éviter les fraudes dans ces bureaux de vote, sous-entendant par là que les bureaux juifs sont à l’abri de toute tentative de fraude !
En réalité ce programme est manifestement destiné à dissuader les Arabes israéliens de se rendre aux urnes. On en veut pour preuve le fait que cette opération de surveillance sera à nouveau mise en place par l’agence de com Kaizler-Inbar qui s’était vantée dans un post publié sur Facebook, peu après le vote du 9 avril, de sa « réussite » en annonçant triomphalement avoir amené la participation électorale des Arabes israéliens à moins de 50%, le chiffre le plus bas depuis des décennies.

Si vous vous y retrouvez dans ce micmac vous aurez bien du mérite.