1962. J’ai 13 ans, mes parents – qui m’ont élevé totalement en-dehors de la religion et de la culture juives (sauf pour le pain au cumin qu’on appelait yiddish broyt) – ont l’idée saugrenue de décréter que je dois faire ma Bar Mitsvah… Je quitte donc le cours de morale laïque de l’athénée de Woluwé-Saint-Lambert pour rejoindre le cours de religion israélite.
A côté de moi, le seul autre élève juif de l’athénée, Pierrot Schwartz, en face de moi, le rabbin, Monsieur Meissnerrrrr… En catastrophe, il m’apprend à lire l’hébreu, à lire oui, mais faute de temps, je n’ai jamais su le sens des mots, je lisais. Monsieur Meisner amène aussi des 78 tours qu’il a enregistrés lui-même et j’apprends à chanter dans une langue inconnue… Barouh aata Adonaï,..
A cette époque, je suis encore un élève docile, et les choses se passent comme elles doivent se passer. Le grand jour, je me retrouve à la synagogue, petit costume gris, cheveux brylcrémés, ma nouvelle montre Helva (« Car elle va la montre Helva ») au poignet, mes parents débordant de fierté. Alors, je fais ce qu’il faut, j’assume, je chante ce que je dois chanter, j’ânonne les textes que je dois ânonner… et je dois promettre au rabbin qu’il me reverra chaque semaine à la synagogue. Le premier grand mensonge de ma vie … Le mercredi suivant, comme de bien entendu, je quittais le cours de religion israélite pour réintégrer le cours de morale laïque …