Par Tessa Parzenczewski
Pénétrer dans les maisons, filmer objets, meubles, animaux, plantes et débusquer l’habitant. C’est ainsi que Karine de Villers et Mario Brenta ont dressé une série de portraits, amis, proches, souvent artistes, entre Italie, France, Belgique. Que disent de nous nos maisons? Et, avec le temps et l’éloignement, qu’éveillent-elles encore?
Un vol d’oiseaux, des arbres, ruisseaux et rivières, tout nous parle. Un homme évoque les Alpes où il vit, et imagine la trajectoire de l’eau, vers le Pô, le Danube, le Rhin? Une caravane isolée, un troupeau de moutons aux clochettes obsédantes et le berger dans son antre. Monologues intérieurs, souvenirs, les personnages se révèlent. D’innombrables chats traversent l’écran, non pas comme figurants, mais comme des êtres à part entière, au même titre que l’humain. Les fleurs superbes ne décorent pas, elles font partie du récit…
Souvenirs personnels, vies revécues, interrogées. Des échappées littéraires aussi, lorsque Boris Lehman environné de ses propres portraits, lit Edgar Allan Poe… Certains se font conteurs, vers des contrées rêvées, Ermanno Olmi, le réalisateur de « L’Arbre aux Sabots » n’est que doutes avant d’entamer un nouveau film. Et Michèle, la sœur de la réalisatrice, peint des icônes avec une ferveur touchante. Parfois la télévision, en miroir, dialogue avec la vraie vie.
Portraits, mais aussi autoportraits. Karine de Villers retourne à sa maison d’enfance. Les souffrances se réveillent. Episodes douloureux, séparation, et la tragédie finale, « Ma mère ne savait pas qu’elle n’avait plus que deux ans à vivre… »
Mario Brenta, vénitien, né sur la Riva degli Schiavoni, découvre d’abord le monde par les fenêtres, et quel monde! Vue sur la lagune et ses multiples embarcations… Plus tard, il ira jusqu’en Afrique, le fleuve Congo, et là aussi des barques. Retour à Venise, les plaques des rues s’enchaînent et forment une topographie qui fait rêver.
Voilà plus de dix ans que Karine et Mario construisent une œuvre commune, après avoir créé individuellement. Une œuvre à nulle autre pareille. Des films poèmes, où les registres fusionnent, de l’individuel au collectif, où la nature pactise avec l’humain et où, arrêts sur image, les détails jamais anodins, envahissent l’écran. Une émotion rare, que l’on ne peut définir, émane de leur cinéma.. « Derrière la Porte » est leur dernière création.
Nous recevrons Karine de Villers et Mario Brenta le 21 janvier à 16:00 pour une projection de son film Derrière la porte suivie d’une discussion.