[Entretien] Les « madrés » contre les violences policières : Rencontre avec Latifa Elmcabeni et Claudine Van O

Logée à Saint-Gilles depuis tant d’années et mobilisée sur de nombreuses problématiques socio-politiques qui agitent notamment la commune, notre UPJB se devait de rencontrer ce Collectif des Madrés dont l’actualité s’est faite l’écho ces deux dernières années. Ce dimanche 9 mai, à l’occasion de la fête des mères, elles organisent une manifestation pour exiger l’égalité et la justice pour les enfants et les jeunes qui subissent des violences policières dans leur quotidien.

Ava Silovy, Hannah Vanderghinst-Lachterman et Alain Lapiower ont rencontré Latifa Elmcabeni et Claudine Van O, toutes deux membres du Collectif le 26 avril 2021.

Claudine Latifa, peux-tu nous expliquer comment est né le « Collectif des Madrés » et pourquoi ?

Latifa : Le collectif des Madrés est né en 2018 avant une première interpellation du Conseil Communal. C’est un groupe de mamans qui s’est donné pour mission de lutter contre les discriminations que subissent les jeunes du bas de Saint-Gilles et de sensibiliser le public sur les difficultés en matière de réinsertion, prison, emploi, enseignement, décrochage scolaire… Notre deuxième mission est en rapport avec les violences policières dont ces jeunes sont victimes. Faire connaître les droits, en parallèle avec la Ligue des Droits Humains, travailler avec les maisons de jeunes, et puis sensibiliser les parents, parce que les violences policières c’est un sujet tabou et il est difficile de libérer la parole. Dans notre quartier, mais le problème se pose aussi dans tout Bruxelles et même à l’étranger… La question du racisme existe depuis longtemps, ce n’est pas nouveau. Moi je suis de la « deuxième génération », mais la 3ème, nos enfants, je crois qu’elle subit encore plus de discriminations et ce sont souvent des mineurs. C’est l’âge hyper fragile où on cherche son identité, où on fait tout un travail sur l’estime de soi ; les discriminations et la violence policière ont un impact énorme sur la santé mentale de nos enfants et c’est comme ça que tout a démarré.

En 2017, je m’intéressais beaucoup à la réinsertion après les séjours en IPPJ1 ou en prison… Je me faisais toujours cette réflexion : pourquoi notre communauté est majoritaire dans les statistiques de personnes incarcérées ? Pas un seul jeune qui n’avait pas fait un séjour en IPPJ  (« Institut Public de Protection de la Jeunesse », centre fermé d’accueil et de rééducation considéré souvent comme une prison pour mineur) ou en prison, c’était devenu presque « normal », on constatait même une sorte de concurrence entre les jeunes, t’es un homme si tu as été en prison ! Quand un gamin te dit « la prison c’est cool », moi ça m’interpelle. Beaucoup de jeunes s’accrochent à la délinquance, faut pas se voiler la face, on a un problème de délinquance à Saint-Gilles, et j’ai voulu vraiment comprendre… On est pas délinquant dès la naissance, c’est tout un parcours au niveau familial, social, scolaire… Il y a déjà beaucoup de discrimination en classe primaire, beaucoup d’enfants sont orientés vers l’enseignement spécialisé et si tu tombes dans cette filière tu es considéré comme handicapé. Puis nos enfants sont tout de suite relégués dans l’enseignement professionnel, puis ils décrochent… Tout est fait pour qu’ils n’aient pas leur place et donc beaucoup de jeunes tombent dans la délinquance pour montrer à la société qu’ils existent… Chaque jeune joue un rôle, celui d’un personnage fictif où il se sent important.

Donc j’ai voulu essayer de comprendre tout cela et je me suis rendu compte que la plupart subissaient des violences policières, et mes propres enfants aussi. En tant que maman, je ne pouvais pas rester insensible, j’avais de la souffrance, de la haine même. Et mon premier réflexe a été de m’adresser aux institutions, voir comment elles pouvaient nous aider. C’est comme ça que nous avons fait appel à Bernard Devos, délégué général aux droits de l’enfant. Il est venu à Saint-Gilles récolter des témoignages de façon anonyme et a rédigé un rapport.

C’est grâce à ce rapport, que le 1er mars 2018 j’ai pu faire la première interpellation au Conseil communal. La première revendication a été la diffusion de ce rapport. La Commune ne voulait pas le rendre public ! Mais il y a eu une « fuite » par la RTBF je crois. Lors de cette première interpellation, nous étions quatre mamans face à Charles Picqué, notre bourgmestre. Je me souviens comment on a été accueillies ! On sentait vraiment un racisme institutionnel et j’en éprouvais beaucoup de souffrance… T’aurais dû voir comment il a crié ! Ça m’a fort blessée. Il m’a tout de suite stigmatisée comme « mère de délinquant », alors que c’était mon droit de signaler ces violences. Il ne voulait rien savoir, un déni total, il disait « pas de plaintes, pas de violences », il avait une confiance totale dans sa police. En fait, c’est un peu grâce à lui que je suis devenue ce que je suis (rires). On voyait la haine qu’il avait vis-à-vis de moi alors que je n’étais pas seule, des citoyens, des travailleurs sociaux me suivaient, mais il ne voulait pas  le reconnaître. Il était au courant, mais il niait, c’était flagrant. Et là, j’ai eu cette impression que je n’avais pas tout à fait ma place en tant que citoyenne belge… Nous avons une carte d’identité belge, mais nous ne sommes pas reconnues, on nous voit comme mères de délinquants, femmes immigrées, islamiques… C’est ce que j’appelle un racisme institutionnel et politique. Un long parcours commençait, des bâtons dans les roues, on en a eu…

 

Latifa lors de sa première interpellation au Conseil communal

Claudine : Ces violences policières dont sont victimes les jeunes du quartier, sont le fait de la « brigade UNEUS » [1] installée par Charles Picqué à Saint-Gilles. Elles ont touché directement les familles car il y a eu des intrusions dans les maisons, de la maltraitance des parents, des frères et sœurs… Elles se sont étendues et des familles d’autres milieux socio-économiques ont été prises dans la tourmente. Ce type de violence existait aussi dans d’autres communes. Jusqu’à la mort d’enfants, Adil, Mehdi, Ibrahima, Ilyes, Akram,… la liste est longue. Le mouvement de protestation s’est étendu et diversifié. Le Collectif des Madrés est devenu une sorte de référence sur cette question des violences policières.

Latifa : UNEUS était censé être un projet pilote de proximité. Par définition, un projet pilote est censé être évalué. Le rapport du délégué aux droits de l’enfant a mis en évidence les dérapages. C’est pour ça que nous demandons une évaluation externe de cette brigade, un suivi des formations ainsi qu’un contrôle démocratique.

Après les deux premières interpellations (il y en a eu quatre en tout), j’ai participé à la réalisation du film « Places Nettes » [2] dans lequel j’évoque ceux que j’appelle les « invisibles », les jeunes violentés. Ces violences existent depuis très longtemps, mais le sujet a toujours été tabou, au point que pour les jeunes c’est devenu presque « normal », ils sont habitués. Une gifle ? Ben c’est pas grave, on fait profil bas, on n’essaie même plus de faire valoir nos droits tellement on a peur de la répression, on dit que porter plainte ne sert à rien…

Il y a donc tout un travail à faire pour que les jeunes et les familles usent de leurs droits, comme faire constater les blessures par un médecin, porter plainte… Ce n’est pas inutile. Les politiques se réfèrent toujours aux statistiques… C’est ce que dit Charles Picqué : « Pas de plainte, pas de problème ». Sur le plan juridique, nous avons des droits et il faut les faire valoir... La brigade UNEUS travaille directement avec le Parquet. Si un jeune se trouve sur les lieux d’un délit, hop, on l’embarque directement et c’est parti, IPPJ ou prison. C’est précisément l’objectif de cette brigade : aller vite, « sécuriser » la commune. Combien de jeunes ont fait de la prison juste parce qu’ils étaient « au mauvais endroit au mauvais moment » ?

Nos enfants ne vivent que ça, on les tire vers le bas. Par exemple un jeune de 14 ans qui joue au foot, les flics arrivent, le provoquent « qu’est-ce que tu fous là ? ». Si le jeune réagit, les flics sortent leur artillerie verbale du style : « vous n’êtes faits que pour la prison, ton frère en a fait », etc.  On les habitue à être harcelés, on leur dit qu’ils ne valent rien, et cette dévalorisation a un énorme impact sur l’éducation. Et là je reviens à la question que je posais au début, pourquoi tant de jeunes de notre communauté sont en prison et en IPPJ ? C’est l’engrenage : décrochage scolaire, délinquance, violences policières…

Un article du Soir s’intéressant au Collectif des Madrés – Janvier 2018

– Alain : Comment réagissent les mamans ? Est-ce que vous cherchez à sensibiliser d’autres mamans, est-ce qu’elles suivent facilement ?

Latifa : En 2018, plusieurs mamans m’ont accompagnée pour la première interpellation. Elles ont vu des policiers d’UNEUS en civil. Elles ont peur et je comprends. Mais c’est trop énorme pour moi, trop grave pour avoir peur. Cette peur, je ne l’ai plus. Soit tu tombes dans la dépression, soit tu milites, j’ai préféré militer. Comme ça je montre l’amour pour mes enfants et qu’il est temps qu’on construise une société plus juste.

Ava : Il faut aussi rassurer les jeunes car les plaintes peuvent se retourner contre eux…

Latifa : Oui il y a la peur. Cette peur des représailles existe dans tous les quartiers. Mais justement, « l’union fait la force », un moment vient où on peut dire stop.

– Claudine : C’est la raison pour laquelle il faut sortir de l’entre-soi communautaire ou géographique (le bas de St-Gilles), ou historique (immigration 1e, 2e, 3e, 4e génération…) ; que les moins exposés, moins fragilisés rejoignent ce combat pour aider à sortir de cette peur, pour que les personnes touchées se sentent soutenues, moins vulnérables et portent plainte.

Latifa : C’est une façon de prévenir ces violences policières. Je vois que les mobilisations ont un impact au niveau politique. En 2012, on était 4 à la première interpellation, on était 200 à la 4e.

– Alain : As-tu l’impression qu’on avance, quelles sont les réactions ?

Latifa : À ce qu’on dit, un budget a été débloqué (il y a déjà deux ans) par la majorité communale pour cette évaluation externe de la brigade UNEUS et qu’elle va être réformée. Mais c’est beaucoup de blabla, il n’y a rien de concret… Il faut savoir que ces interpellations du Conseil Communal, c’est un droit à la « parole citoyenne démocratique », c’est un outil puissant. Je l’ai découvert parce qu’une personne de mes connaissances avait fait une interpellation pour la protection des arbres (rires)…Tu rigoles mais j’ai été la soutenir parce pour nous, dans l’Islam, respecter la nature c’est important, respecter la nature, l’être humain… J’ai constaté que pour les plantes, ça a été vite, ça a été même très vite, la Commune a fait tout ce qu’il fallait ! Mais sur un sujet très grave comme les violences infligées à nos enfants…

Je sais qu’il y a des gens qui sont d’accord avec le bourgmestre, qui ne comprennent pas notre souffrance, qui ne savent rien de nous et qui posent des jugements « c’est encore un mère de délinquant »… Ils organisent des pétitions car ils se sentent insécurisés et demandent encore plus de répression.

– Claudine : J’ai deux enfants et je me souviens comme j’étais malheureuse de certaines injustices subies à l’école par exemple, ridiculement anodines comparées à ce que Latifa explique. Ici il s’agit d’un système, d’une volonté politique… Il faut aussi parler de cette volonté de « nettoyage du quartier ». Depuis plus de 20 ans il y a ce désir de changer la population locale et de chasser ceux qui n’ont pas le niveau social, ce sont des questions de politique de ville…

– Latifa : On explique bien ça dans le film « Places Nettes ». Comment les politiques ont changé le marché de la rue du Fort, la gentrification forcée, l’augmentation des loyers, tous les nouveaux commerces bio, tout est devenu cher… On n’a plus notre place, je ne sens plus le Saint-Gilles d’avant.

– Ava & Hannah : Tu en as déjà pas mal parlé mais on se demandait comment ce collectif s’était formé autour de cette idée de « mères » et pas de parents en général.

Latifa : C’est à cause ou grâce au lien fort qui existe entre nous les mères et nos enfants. Quand il y a un souci, c’est vers les mamans qu’on va se diriger. En tant que mamans, on veut protéger les enfants, on est les piliers de la famille. Les papas sont là aussi, ils sont derrière nous, mais ils ont plus de difficultés à libérer la parole. Ils subissent des discriminations, de l’humiliation, il y a de la colère, mais ils s’expriment plus difficilement….

Claudine : il y a quelque chose de viscéral dans cette appellation de « collectif des madrés ». « Madré », les jeunes appellent leur mère comme ça entre eux, avec ce que cela recouvre comme notion de respect. Si au départ de son combat Latifa s’est d’abord adressée à des alter égos, des mères qui vivaient les mêmes injustices, aujourd’hui nous n’avons aucune envie de limiter le mouvement. On est juste des femmes qui portent une voix. Nous ne sommes ni les seules, ni les premières, ni les dernières probablement. Je pense (avec respect et humilité) aux Folles de la Place de Mai en Argentine, de la Place Vendôme à Paris. Plus récemment, les mobilisations comme le Front des mères… Ça bouge !!!

– Ava : La libération de la parole, ça fait boule de neige, on le voit beaucoup avec les violences sexistes et sexuelles où une prise de parole libère celle des autres.

 

– Hannah : Latifa, quand tu parles de tes enfants, tu parles de tes fils… Je sais que la police s’en prendra plus facilement à des jeunes hommes qu’on associe souvent à des actes de délinquance, je sais qu’il y a cette idée que les filles sont plus sages etc. Je me demandais si on avait noté aussi des ennuis de la part de la Police vis-à-vis des jeunes filles ?

Latifa : Les jeunes filles beaucoup moins. C’est un peu dommage, mais dans notre communauté les filles et les femmes n’investissent pas l’espace public. Quand j’étais jeune —j’ai passé toute mon enfance à Saint-Gilles — les jeunes femmes utilisaient énormément l’espace public, je me baladais en vélo, j’allais au Parc… Tout a changé, je ne sais pas pourquoi, moins de convivialité, moins de communication, plus de racisme, plus de peur pour les filles.

Claudine : Quel est le ressenti des filles et leur vision sur cette répression que subissent leurs frères, est-ce qu’elles les soutiennent, sont-elles révoltées ou au contraire elles leur disent « t’as qu’à rester à la maison » ?

Latifa : Justement, souvent les frères se confient à leurs sœurs mais en leur disant « ne dis rien à papa ou à maman »… Il faut savoir que la plupart des parents croient en la Police, elle représente la loi et la sécurité. Quand un jeune a subi des violences policières, le premier réflexe des parents c’est « mais qu’est-ce que tu as encore fait, t’as encore traîné avec untel, vous avez dealé ? ». Cette stigmatisation est ancrée dans leur quotidien…

Après le décès d’Adil [3], ce qu’on a mis en avant c’est qu’il ne voulait pas s’arrêter, qu’il avait fait de la prison, qu’il avait dealé… On l’a sali. Souvent pour légitimer les violences policières, on justifie : « ce sont encore des parents qui laissent traîner leurs enfants, qui ne les éduquent pas », et puis il ne faut pas oublier ce qui s’est passé avec le terrorisme qui nous a encore plus stigmatisés, on met tout dans le même sac. C’est ce qui fait le racisme institutionnel et politique.

Pourquoi n’y a-t-il pas des contrôles plus démocratiques, une formation des policiers sur nos origines ? La plupart ne savent rien de tout ça, des contrats signés par la Belgique et le Maroc et avec d’autres pays… C’est tout un travail que nous essayons de faire avec le collectif, je voudrais mettre une autre culture en avant ou interviendrait l’artistique, la musique, les films, les débats…

C’est comme ça qu’on va commencer à mieux se connaître et à se respecter. Le respect c’est très important, être à l’écoute et ne pas juger. On est dans une société capitaliste qui ne vit que pour le matériel, on ne vit plus pour l’humanité, c’est chacun pour soi… Quand j’étais petite dans les années 80, mon père m’envoyait tous les matins chez les deux personnes âgées à l’étage du dessus, pour voir ce dont elles avaient besoin, on a perdu cette valeur là.

Je voudrais voir comment on pourrait construire une société plus juste, avec des valeurs humanitaires, des valeurs de convivialité et de solidarité. Pour mon père c’était très important d’aider les gens, quelles que soient leur convictions, et j’ai grandi comme ça. On me stigmatise comme mère de délinquant, mais ils ne savent rien de moi et de mes valeurs. Donc le collectif des madrés c’est beaucoup de choses.

Pour le reste, on attend toujours l’évaluation de la brigade UNEUS, on parle d’une réforme mais on n’en sait pas plus.

– Alain : Et Bernard Devos ou la Ligue des Droits Humains ?

Latifa : Je fais partie du comité de concertation de la L.D.H. Nous mettons beaucoup de choses en place dans les écoles, les maisons de jeunes, par exemple. On explique les droits, comme le droit de porter plainte, d’avoir un avocat pro deo… On essaie aussi de sensibiliser des médecins, des psychologues, des travailleurs sociaux, de les inviter dans les maisons de jeunes car pour libérer la parole il faut la confiance. Il y a pas mal de maisons de jeunes à Saint-Gilles, mais c’est difficile, ils ont peur car ils sont subsidiés par la Commune. Faut pas se voiler la face, il y a une pression donc on y arrive pas toujours. La prévention, c’est déjà d’organiser des activités avec les jeunes après 14-15 ans. Il y a beaucoup pour les enfants jusque 12-13 ans puis plus rien ! Or c’est là qu’ils commencent à traîner dans la rue. J’avais plein d’idées notées dans un carnet, mais je n’ai jamais été écoutée. J’insiste beaucoup sur la prévention.

Ava : Avec le Covid la répression envers les jeunes a empiré ?

Latifa : Oui, le Covid a aggravé les choses. Par exemple, des jeunes reçoivent des amendes alors qu’ils n’ont même pas été interpellés ! Au début du confinement on recevait des paquets de PV, j’y comprenais plus rien, des montants catastrophiques. On a réussi à en faire annuler quelques uns grâce à un avocat. Ce sont des vraies représailles. Avec le Corona on est sensé ne pas se rassembler mais quand tu vas rue Neuve, on est tous serrés pour faire du shopping, c’est ça le monde capitaliste.

Alain : Que pourriez-vous attendre d’une association comme la nôtre ? Il se fait qu’on est logés juste en face de chez toi, tu connais certains d’entre nous, tu es même venue à notre bal, au Parcours d’Artistes.

Latifa : Tu vois donc que je suis très ouverte. Déjà diffuser le film Places Nettes (c’est prévu dès que le virus le permettra ndlr) pour que les gens puissent comprendre un peu mieux les enjeux du quartier… Pour pouvoir travailler ensemble, il faut d’abord se connaître, apprendre à se respecter mutuellement… On pourrait aller vers une rencontre entre Juifs et Musulmans, informer les gens sur nos histoires et nos cultures respectives, acquérir un regard plus respectueux. Et aussi faire des actions concrètes ensemble pour combattre les discriminations et les violences raciales.

Claudine : Il me semble que du côté des citoyens, beaucoup de gens ont compris et sont touchés par ces violences policières. Partout des avocats, des médecins, des médias, des artistes s’impliquent… Soyons optimistes.

Mais l’implication locale est plus compliquée… Saint-Gilles compte tant d’associations humanistes, mais très peu s’impliquent sur le terrain, osent se manifester auprès du pouvoir communal. Entre celles qui sont subventionnées par la commune et celles qui ne vivent pas ces problèmes dans « leur chair »… On travaille aussi à ça avec le Collectif.

Alain : Vous préparez une action concrète pour très bientôt…

– Claudine : Nous préparons une Marche blanche (statique puisqu’on ne peut pas se déplacer) ; elle aura lieu le 9 mai, le jour de la fête des mères.

À 14h00, nous rejoindrons le rassemblement place Lumumba en hommage à Lamine Bangoura, tué par la police belge à son domicile il y a tout juste trois ans (voir les détails dans l’appel joint).

De 16h00 à 17h30, nous nous réunirons au Mont des Arts / Place Albertine.

Vous l’aurez compris, notre objectif premier est de dénoncer les violences policières à l’égard de nos jeunes et d’exiger qu’elles cessent !

On vous y attend… !!!

La page Facebook de l’événement ici et celle du Collectif des Madrés est .

[1] Projet dit de « proximité » censé allier prévention et sécurité dans les quartiers de la commune. Celui-ci a donné lieu à de nombreuses dérives à caractère raciste et violent de la part des agents impliqués, puis à de nombreuses protestations dont la presse et internet se sont faits l’écho.

[2] Places Nettes, un film de Jos Beni, Pierre Corbisier, Xavier Dupont, Latifa Elmcabeni, Nadia Elmcabeni, Maud Girault, Jonathan Vard (2019 – 85’) – Prod. : CVB. Le pitch : Bruxelles, sept habitant·e·s de Saint-Gilles enquêtent sur leurs rapports aux espaces publics de cette commune en plein boom immobilier. Là où cohabitent Saint-Gillois·e·s de toujours, SDF et « Sans Difficultés Financières », jeunesse violentée et nouveaux arrivants, quelle place chacun trouve-t-il ? Que deviennent les histoires personnelles et collectives quand l’économie de marché recouvre la ville de son vernis implacable ?

[3] Le 10 avril 2020, Adil, un jeune de 19 ans, a perdu la vie après un choc avec une voiture de police. Il fuyait un contrôle et, lors de la poursuite, avait heurté une voiture de police qui venait en sens inverse. L’affaire avait déclenché des scènes de colère à Anderlecht. Un témoin avait indiqué que la police était à l’origine de la mort d’Adil.