Tout dans les multiples crises actuelles dans le monde, nous incite à un pessimisme sans nom. Mais la guerre en Israël-Gaza, si meurtrière en termes humains, et pour nous juifs diasporistes non sionistes, la plus horrible, sidérés et écartelés que nous sommes entre horreur, indignation et compassion suite aux assassinats barbares de juifs par le Hamas, rappel des pires pogroms du passé, et entre indignation suite à déjà des milliers de morts et de blessés à Gaza et la crainte de tant de morts et de destructions encore à venir du côté palestinien surtout, suite à la très dure riposte israélienne. Tant de questions nous assaillent !
Le 10 octobre, j’écrivais au CA :
La terrible guerre qui vient d’éclater, me bouleverse, et fait peser sur les épaules du CA la lourde charge de réagir dans l’urgence à ces évènements, de manière intelligente, mais sensible ! Dans le communiqué, pour les manifs à venir, dans les activités de la semaine, et quoi pour le bal de samedi ? Je comprends les difficultés de votre tâche, et n’ai pas de recette à vous proposer, sinon de faire preuve de sagesse et de mesure, susciter et partager avec nos membres l’indignation et l’émotion qu’une telle guerre suscite, qui va faire de nombreuses victimes des 2 côtés, et ne pas se lancer aujourd’hui dans une rhétorique d’accusations unilatérales.
Après lecture du communiqué UPJB du 10 octobre :
Je suis très déçu ! Cinq lignes pour condamner très sèchement et sans aucune émotion les attaques du Hamas, qui n’est même pas nommé, et rien pour dénoncer « les monstruosités des actes commis », comme dit Clémentine Autain dans un excellent communiqué, et puis une énorme tartine, beaucoup trop longue, de dénonciations de tous les méfaits israéliens, non qu’ils soient inexacts, mais le ton ne correspond pas du tout aux circonstances du moment.
NB. Lors de la journée du 14 octobre à l’UPJB (le soir où devait avoir lieu le Grand Bal Yiddish, annulé étant données les circonstances, les membres de l’UPJB se sont réuni·es pour échanger sur les évènements en cours, ndlr) , dans les ateliers de discussion, mon point de vue critique sur le communiqué du 10 octobre est largement partagé. Cela ne doit plus se reproduire !
Dans toutes les actions futures que mènera l’UPJB, communiqués et manifestations, en solidarité avec le sort horrible et injuste fait par Israël aux Palestiniens, il faudra veiller à ce que notre identité diasporique juive, avec sa sensibilité particulière, soit bien présente : car oui, toute victime juive dans le monde de la haine anti-juive nous touche toujours beaucoup, mais n’occulte pas notre émotion devant les victimes palestiniennes.
Que penser de ce qui est en cours à Gaza :
Pourquoi le Hamas a-t-il lancé la guerre de cette manière si barbare, avec la prise de tant d’otages, et avec le mépris pour sa propre population de Gaza, qu’il prend aussi en otage, connaissant bien la riposte que cela provoquera d’Israël. Le Hamas a exposé délibérément sa population à la mort, après lui avoir imposé pendant des décennies un régime islamiste liberticide ?
Quels sont les objectifs des Israéliens ?
Plus que la critique, j’éprouve du dégoût pour la politique du pire menée depuis des décennies par les gouvernements israéliens vis-à-vis des Palestiniens, qui culmine aujourd’hui, sous le pire gouvernement d’extrême droite de l’histoire d’Israël, celui de Netanyahou. Exterminer le Hamas, quel qu’en soit le prix pour ses otages, et pour les Palestiniens de Gaza qui subissent une situation insoutenable ! Les crimes de guerre ont été et sont commis des 2 côtés ! Et Israël annonce une guerre longue, comment survivra-t-on à Gaza, prison à ciel ouvert sous les bombes, sans eau, électricité, etc. et sans informations fiables, rien que celles du Hamas ?
Qui et qu’est ce qui pourrait mettre fin aux combats, aux destructions massives et aux milliers de morts de civils. Qui pourrait imposer un cesser le feu immédiat pour sauver les otages ? Et pour négocier quoi, une simple trêve ou une solution équitable pour les 2 peuples enfin, pour ce conflit qui dure depuis 75 ans ? Impossible sans une forte pression extérieure, des Etats Unis et de l‘ONU, mais ils sont très affaiblis, et donc c’est plus qu’improbable. Et Israël peut-il négocier avec le Hamas ? Tout semble indiquer que non, il veut le détruire, mais est-ce possible ? La situation est inextricable et lourde de dangers de toutes parts, avec le risque d’extension du conflit au nord, avec le Hezbollah au Liban et l’Iran en soutien logistique.
Et quelles incidences en Europe et dans le restant du monde, où le conflit s’exporte déjà dans les populations musulmanes, où l’amalgame juif-Israélien mobilise des foules contre les juifs ?
Que doit faire et dire l’UPJB, minorité progressiste, qui revendique son identité diasporique juive particulière, tout en manifestant sa solidarité avec la cause palestinienne, victime de tant d’injustices. Ici des sensibilités diverses doivent pouvoir s’exprimer dans le respect des différences, à la recherche de convergences. Soutenir les militants de paix tant israéliens que palestiniens. Être un lieu, une interface, où tous les hommes et femmes de bonne volonté, qu’ils soient juifs, musulmans, laïcs, ou autres, peuvent dialoguer et agir en vue d’essayer de contribuer si peu soit-il, à faire advenir un jour une paix juste et équitable sur cette terre millénaire, qui doit devenir la patrie de deux peuples égaux en droit et en dignité.
Toutes ces questions nous assaillent, mais Il faut se battre pour que la raison l’emporte, il faut éduquer, former les enfants au respect de l’autre et adapter la démocratie au monde d’aujourd’hui et surtout la défendre contre les dérives autoritaires, quelles qu’elles soient.
Jackie Schiffmann